Rémanence du vivant.
La capacité de perception crée ses propres
illusions. Ainsi quand je passe la tête en moi et regarde en bas, j’aperçois le
mouvement d’ombres mimant les vivants : je crois que je m’y vois. Elles sont la
rémanence de ceux que j’ai aimés qui ont disparu ou fui, une sorte de
d’irrationnelle survivance parmi l’oubli.
Ma mémoire est un charnier que nulle chair
n’habite. Apparemment seulement car j’ai oublié les corps de celles que j’ai
aimées – mais si je grattais, je les y retrouverais. Et si ma conscience
éclairait, enfin déterrés je verrais les corps auxquels ses ombres devraient
être attachées, je verrais des chairs décomposées.
Si j’étais capable de lever les yeux juste une fois, je distinguerais une
dernière ombre, une ombre tentant de déterrer un corps vivant : moi. Et je
n’aurais pas la force de l’aider.